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Wamen / Macron : la mise au « poing » classe contre classe

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Julian Vadis et Paul Carson-Saher

La macronade est un plat qui ne refroidit jamais, surtout sur RMC. Estimant le matin que « la vie d’un entrepreneur est parfois plus dure que celle d’un salarié », le ministre a rencontré un peu plus tard le syndicaliste CGT Mickael Wamen, condamné pour avoir retenus deux cadres de Goodyear pendant une nuit. Pas sûr que les balbutiements du loup de Bercy puissent convaincre le plus grand nombre...

Après avoir plusieurs fois crispé la gauche par des prises de position profondément anti-sociales, notamment sur les 35 heures ou sur le statut des fonctionnaires, le ministre de l’économie a encore récidivé, ce mercredi 20 janvier, au micro de Jean-Jacques Bourdin. En déclarant que « la vie d’un entrepreneur est parfois plus dure que celle d’un salarié. Il peut tout perdre, lui, et il a moins de garanties », Emmanuel Macron est au centre d’une nouvelle polémique, qui s’érige au rang de traditions, tant le ministre de l’économie a, à son actif, une pléiade de déclarations et de réformes pro-patronales.

Rassurer les entreprises dans l’intérêt des travailleurs : L’écran de fumée made in PS

Avec une telle entrée en matière, le tête-à-tête sur les ondes de RMC entre Macron et Mickael Wamen, syndicaliste condamné à 9 mois de prison ferme dans l’affaire GoodYear, ne pouvait être que tendu.

Au centre du débat, la nouvelle loi de plafonnement des indemnités aux Prud’hommes. Une énième loi pro-patronale du ministre de l’économie, qui fait polémique à la gauche du PS, et qui estampille un peu plus Emmanuel Macron comme étant un « ministre de droite ». Arguant qu’il y avait des « inégalités dans les situations, profondes. Vous pouvez vous retrouver aux prud’hommes avec 50 000 euros de dommages et intérêt dans un département, 250 000 dans le département voisin », le ministre a repris une doctrine récurrente du « néo libéralisme réformiste » permettant au PS de sauvegarder ce qui peut de loin ressembler à un visage de gauche : Il faut rassurer et accompagner les entreprises pour que celles-ci investissent et recommence à embaucher.

Ainsi, Macron présente le plafonnement des indemnités de licenciement comme étant le moyen « d’harmoniser » les dits plafonnement à échelle nationale - par principe égalitaire - ce qui aurait pour effet de raccourcir les procédures. « Je n’ai pas entendu Hollande dire qu’il allait plafonner les indemnités de licenciement » ironise Wamen, « On fait des lois parce qu’on a le mandat de réformer le pays. C’est le mandat du président de la république pour le peuple français » lui rétorque Macron. Une passe d’arme sur laquelle s’appui le ministre de l’économie pour créer l’illusion d’un cercle vertueux « gagnant - gagnant » : il faudrait encourager et non contraindre les entreprises à embaucher. Et pour cela, la loi proposée est évidemment une « avancée » car elle simplifie les démarches de licenciement lorsqu’une entreprise va mal. En bref, les entreprises sont rassurés et embauchent dès qu’elles peuvent, puisque débarrassé du fardeau insoutenable d’indemnité potentiellement élevé de licenciement. Des balbutiements qui peinent à convaincre tant la pirouette est grotesque. Cela n’empêche pas Macron de poursuivre, et d’affirmer que le « reclassement » par le biais de « reconversion » permettra d’endiguer les pertes d’emplois à venir. De la flexibilité pour résoudre les problèmes du chômage en guise de cerise sur le gâteau. Le ministre de l’économie tente de promouvoir une réforme pro-patronale qui serait in fine, par magie (ou charité) capitaliste, bénéfique aux salariés dans un avenir indéterminé.

« [Votre loi] a de sens uniquement pour les patrons ! »

Mais le ministre de l’économie a eu bien du mal à garder le masque face à un Wamen pour le moins déterminé. C’est une loi qui « ne permet pas de sécuriser les emplois, mais qui permet de sécuriser les licenciements » explique le syndicaliste tout en poursuivant sur la nécessité de voter des lois « interdisant » les licenciements « dans les entreprises qui font du profit », conformément aux promesses faites par François Hollande à ... Wamen devant l’entreprise GoodYear d’Amiens lors de la campagne de 2012. « Ca n’existe pas, ou alors vous vivez dans une économie fermée administrée. Ce n’est pas l’économie française, on a besoin d’investissements ! On a besoin des entrepreneurs » répond alors Macron. Une prise de position qui en dit long, car il réfute la doctrine même du PS que s’est efforcé de défendre le ministre de l’économie. En effet, les entreprises qui font du profit, dans le rêve d’un capitalisme vertueux made in PS, n’ont précisément aucune raison de licencier, ne serait-ce qu’à court terme. Pourtant, et malgré les contraintes supposées insupportables de procédures aux Prud’hommes, ces mêmes entreprises n’hésite pas à mettre en place de grand plan de licenciement, présenté comme préventif.

« [Votre loi] a de sens uniquement pour les patrons ! » déclare Wamen. En effet, cette réforme facilite les licenciements pour le patronat, ce qui facilite par conséquence la baisse du « coût » représenté par la rémunération des travailleurs, et augmente du coup ses profits par le biais du dégraissage des effectifs, tout en augmentant la productivité. Macron tentera même d’accuser les travailleurs de GoodYear d’avoir bloqué l’entreprise « contre ses intérêts économiques » et donc d’avoir paralysé la firme pendant 7 ans et demi. Un ultime affront de la part de Macron, affichant ici un mépris de classe saisissant et son visage le plus ouvertement ultra-libéral.

De plus, recoupé à sa déclaration du matin, l’ensemble des éléments de l’interview met en exergue la défense de l’idéologie capitaliste à la sauce socialiste. En opposant dialectiquement l’entrepreneur du salarié - et en invisibilisant les rapports de classes -, Macron divise implicitement la France qui (se) bouge pour générer des emplois – donc méritante dans la rhétorique capitaliste – et celle qui reste passive, attentiste, grégaire – donc négligeable... Avec en point d’orgue le licenciement sauvage présenté comme allant dans le sens des travailleurs sur le long terme, nul doute que ce n’est pas sur les ondes de RMC que Macron sera apparu comme un homme « de gauche ». Mais le face à face avec Wamen aura, au contraire, exposé sur la scène publique les antagonismes de classe, avec un exécutif étatique totalement dévoué aux intérêts patronaux.

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Mis à jour le dimanche 21 avril 2024