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Vers une prolongation ad vitam aeternam de l’état d’urgence ?

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Ce vendredi 22 janvier, lors d’une interview donnée à la BBC, Manuel Valls a déclaré que l’état d’urgence serait maintenu « jusqu’à ce que Daesh soit éradiqué ». Cette nouvelle sortie de route a ensuite été infirmée par le gouvernement dans la soirée. Ce dernier a réitéré ses propos sur une prolongation de l’état d’urgence de trois mois. Cafouillages à l’Elysée, Valls serait-il allé trop loin ?

Renan Granger

Valls, toujours plus fort !

C’est donc une nouvelle étape franchie dans la compétition lancée entre Macron et Valls depuis quelques jours pour savoir qui apparaitra le plus dans les médias. Avec chacun sa spécialité. Pour le ministre de l’Economie, désigné comme un présidentiable crédible par un récent sondage, on fait plutôt dans les provocations à l’adresse des travailleurs, qui seraient pour lui mieux traités que les patrons en France. Pour le ministre de l’Intérieur, c’est la course aux idées réactionnaires et, de ce point de vue, il faut reconnaitre qu’il ne se défend pas trop mal. Voilà donc maintenant que celui-ci propose de maintenir l’état d’urgence jusqu’à temps que Daesh soit éliminé, c’est-à-dire pour des mois voire des années supplémentaires. On se demanderait même si ce n’est pas une manière détournée de déclarer l’état d’urgence permanent quand on connait les responsabilités des gouvernements occidentaux dans la montée de l’Etat Islamique, ce que la logique guerrière et sécuritaire actuelle ne fera que renforcer.

Les déclarations de Valls sont donc venues contredire la version officielle donnée par l’entourage de Hollande le matin après les propos de Pierre Laurent qui annonçait que le gouvernement souhaitait prolonger l’état d’urgence jusqu’en mai. Mais, dans la soirée, le gouvernement confirmait finalement la prolongation de trois mois de l’état d’urgence. Cette série de déclarations contradictoires sont révélatrices des limites que rencontre l’exécutif pour mener à bien son projet toujours plus autoritaire et réactionnaire.

Les limites de la lepénisation

En effet, la mayonnaise sécuritaire et réactionnaire du couple Hollande-Valls a, depuis quelque temps, de plus en plus de mal à prendre dans l’opinion publique. La chape de plomb qu’avait voulu imposer l’exécutif commence de plus en plus à se fissurer, et les voix dissidentes à se faire entendre. Une semaine plus tôt, le commissaire aux droits de l’Homme, Nils Muiznieks, avait prononcé un réquisitoire dans lequel il dénonçait les « dérives » de l’état d’urgence en France, y voyant un « risque » pour la démocratie. Mardi, c’est la Ligue des Droits de l’Homme (LDH) qui a saisi le Conseil d’Etat pour demander la suspension de l’Etat d’urgence. Mardi toujours, cinq rapporteurs de l’ONU chargés des droits de l’Homme recommandaient à la France de ne pas le prolonger au-delà de la date de fin actuelle.

Surtout, ce vendredi, pour la première fois depuis la proclamation de l’Etat d’Urgence, le Conseil d’Etat a décidé de suspendre l’assignation à résidence d’un homme, Halim A. L’Etat français devra, de plus, le dédommager de 1500 euros, une somme ridicule compte tenu de la violence de l’assignation à résidence subie pendant un mois avec obligation de pointer trois fois par jour au commissariat, interdiction de quitter son domicile la nuit, et interdiction de quitter son lieu d’assignation à résidence la journée sans un sauf-conduit du préfet de police. Mais une somme symbolique tout de même.

Le Conseil d’Etat a ainsi estimé que le ministère de l’Intérieur n’avait pas apporté assez d’éléments pour justifier l’assignation à résidence. Si, pour ce gouvernement raciste, être musulman ou identifié comme tel, suffit pour être violenté, assigné à résidence, ou même se faire tuer, pour le Conseil d’Etat, en revanche, ça n’est pas passé… pour cette fois ! Pour Hollande et Valls, à trop vouloir ressembler à Le Pen, on finit par se faire désavouer par ses propres institutions, pourtant bien racistes elles aussi.

Seule une mobilisation large de notre classe permettra d’y mettre fin !

Si la dérive réactionnaire et sécuritaire du gouvernement commence à créer des contradictions au sein même de l’Etat Français et des partis institutionnels, il ne faut pas s’y méprendre. Pour remettre en cause définitivement l’état d’urgence, le racisme, la guerre et la violence patronale, c’est bien sur nos propres forces qu’il faudra compter. Ce ne sont pas les ministres, les députés et les bureaucrates de l’Etat français, mais bien ceux qui vivent au jour le jour les conséquences de l’état d’urgence qui peuvent le remettre en cause.

« C’est à nous de reprendre le pouvoir ! », disait Mickaël Wamen il y a dix jours, ancien Good Year condamné à 9 mois de prison ferme pour s’être battu contre la fermeture de son usine. Ce « nous », c’est celui des travailleurs d’Air France qui ont mis, hier, un coup d’arrêt à la répression patronale par leur lutte exemplaire, c’est celui d’Amine Bentousi et de son flic assassin acquitté par la justice de classe, c’est aussi celle de nos camarades migrant(e)s traqué(e)s par la police et les milices d’extrême droite main dans la main. C’est ce « nous » qui doit descendre dans la rue le 30 janvier prochain, contre l’état d’urgence, plus que jamais au service des classes dominantes et de leur projet.

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Mis à jour le samedi 13 avril 2024