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Alors que le mouvement s’amplifie en vue du 17, que va chercher l’Unef à Matignon ?

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Il y avait plus de 100 000 étudiants et lycéens dans la rue ce mercredi 9 mars. Une déferlante pour un premier jour de mobilisation, à la hauteur de la dynamique que l’on avait déjà constaté dans les assemblées générales d’université, à Toulouse, à Paris 1, à Paris 8 et au total sur plus de cinquante sites depuis lundi. Ce jeudi, le mouvement a continué à se structurer, avec en ligne de mire la journée du 17 mars, déjà reprise par plusieurs structures syndicales côté salariés. Le gouvernement est fébrile à l’idée d’un mouvement qui s’étende, s’ancre dans la durée, et aille vers le tous ensemble. C’est pour cela qu’il a fait mine de reculer sur la question du travail des apprentis ce jeudi matin, et qu’il a invité Unef, la Fidl et UNL (lycéens) à Matignon pour aujourd’hui... une invitation qui malheureusement n’a pas été déclinée.

Guillaume Loic

Des annonces qui marquent la faiblesse du gouvernement : avancer, pas négocier !

L’information était parmi les grands titres de la matinée ce jeudi : Manuel Valls a annoncé un premier lâcher de lest, au sujet du temps de travail des apprentis, dont la loi prévoyait de permettre l’extension jusqu’à dix heures par jour et quarante par semaine. Retour à la situation actuelle donc, situation qui n’a rien d’acceptable pour autant : ces jeunes surexploités, qui travaillent souvent autant que leurs collègues plus âgés, ne gagnent que 25% du SMIC faute d’être majeur... Dans le même temps, la presse évoquait la possibilité d’une surtaxe des CDD, revendication de longue date de la CFDT.

Ces annonces montrent d’abord la fébrilité de Hollande et Valls, qui savent qu’une mobilisation de masse de la jeune génération pourrait sérieusement assombrir leur avenir. Le porte parole du gouvernement Stéphane Le Foll avait d’ailleurs un ton doucereux au soir du 9, assurant qu’il était « légitime » que les jeunes contestent et se mobilisent. Mais il s’agit aussi d’une politique de la main tendue envers les grandes organisations réformistes, qui constitue une tentative claire de diviser le front de combat unitaire qui s’est bâti dans la jeunesse depuis deux semaines - d’autant plus que Matignon recevra l’Unef et l’UNL pour discuter de la loi ce vendredi. Un rendez-vous ambigu, et qui devrait susciter une colère légitime chez les jeunes qui ont commencé à construire la mobilisation. On se souvient en effet d’autres reculades de l’Unef, quand Villepin a accepté de retirer le CPE par exemple, ou pire, au moment de la LRU. Mais pour l’instant cette première manœuvre, heureusement, n’a pas empêché le cadre unitaire des organisations de jeunesse de réaffirmer ce jeudi soir lors d’une réunion son attachement au retrait intégral d’une loi jugée aussi peu amendable que négociable. Ce point d’accord essentiel doit continuer à être le ciment de la mobilisation, qui n’en est qu’à ses débuts et met désormais le cap sur la préparation de la journée du 17.

Le 17 mars peut être plus réussi encore que le 9 : il faut massifier le mouvement !

Plusieurs centaines de milliers de jeunes et de salariés ont pris part aux manifestations de ce mercredi. Le sentiment, sur les facs et sur les lycées, mais aussi sur les lieux de travail, était à la surprise et à la joie face à l’ampleur du début de mouvement, un sentiment qui insuffle à présent une forte attente pour le 17, cette date qui a émergé dans le paysage après avoir été appelée par l’assemblée générale des étudiants du Mirail à Toulouse. Dans la foulée, des dizaines d’AG s’en sont saisies, et ce jeudi soir elle était non seulement définitivement adoptée par l’ensemble de l’interorga de jeunesse, mais on commençait aussi à voir poindre des appels du côté de Solidaires, et de la CGT en Haute Garonne, à Paris, dans la métallurgie. Cela traduit la volonté de larges secteurs de salariés de continuer à prendre la rue avec les jeunes, sans attendre la date du 31 mars.

Après le premier embrasement, celles et ceux qui veulent construire ce mouvement et faire reculer le gouvernement doivent désormais se poser la question de la massification. Dans la jeunesse comme ailleurs, le travail d’information autour de la loi n’en est qu’à ses débuts, et sa réalisation est un facteur clé. Matériel imprimé, conférences, ciné-club... les idées fleurissent sur les campus, que la mobilisation peut facilement ouvrir pour en faire des espaces de politisation au delà du milieu étudiant. Pour que la mobilisation s’étende au delà de la première frange d’étudiants et lycéens entrés dans le mouvement, il faut que cette dernière fasse de la massification la tâche principale de l’heure. C’est souvent un défi alors que les réflexes de mobilisation ont été oubliés après six années sans grand mouvement dans la jeunesse, une situation qui laisse les révoltés des premières AG sans suffisamment de perspectives, et souvent avec l’idée que l’alpha et l’omega serait le blocage et l’occupation, entre convaincus. Notre conception de la grève étudiante doit au contraire faire toute sa place à un militantisme de conviction, créatif, décidé, rythmé, qui permette aux deuxièmes AG, puis au 17, de constituer un véritable saut dans la mobilisation.

Le mouvement étudiant se structure : une première coordination nationale le 19 mars

Ce sont les sept cent étudiants de Tolbiac, réunis mercredi en AG, qui ont lancé les premiers le mot d’ordre de coordination. Ce dernier constitue l’une des meilleures traditions du mouvement étudiant en France, et il était effectivement d’actualité à partir du moment où des dizaines d’universités voyaient s’éveiller la mobilisation. C’est donc le 19 mars, et à Paris 8 à Saint-Denis, que l’ensemble des facs qui sont entrées en mouvement se rencontreront pour établir ensemble un plan de revendications et de mobilisation unifié à l’échelle nationale. Cela permettra, à partir d’un système démocratique de délégation à partir des assemblées générales d’université, de doter le mouvement d’une structure d’animation nationale auto-organisée. Cette coordination sera précédée d’une autre, à l’échelle de la région parisienne, le mercredi 16 mars après-midi. Ainsi se dessine la deuxième phase de la mobilisation, qui pourrait être explosive, avec un nouveau calendrier après le 17 mars. Et cette structuration nationale se double de ce qui est en train d’éclore au niveau local, avec un véritable militantisme de la grève sur de nombreuses facs, à travers des comités de mobilisation mis en place par les AG. Ces comités regroupent les étudiants les plus actifs, et permettent de déployer les énergies autour des nombreuses tâches nécessaires à la construction du mouvement : diffusion de matériel, organisation d’événements, organisation de délégation pour se lier aux cheminots ou aux lycéens, etc.

Un mouvement lycéen qui n’en est qu’à ses débuts

Une centaine de lycées étaient bloqués dans tout le pays ce mercredi, et au fil des comptes rendus on peut réaliser l’ampleur de la mobilisation lycéenne dans certaines villes comme Paris, Grenoble, Tours, Lille, Toulouse, Lyon, etc. Sans que le mouvement ait l’explosivité de ce qui s’était passé en 2013 contre l’expulsion de Khatchik et Leonarda, il atteint d’ores et déjà une extension nationale plus forte et, surtout, il pourrait être massivement porté par le développement de la mobilisation sur les universités. A Paris, une assemblée générale interlycées a réuni une centaine de lycéens mercredi après la manifestation, et a adopté elle aussi la date du 17 comme future échéance de blocage et de déferlement dans la rue. En amont, on avait vu s’organiser sur plusieurs lycées des réunions de discussion, avec jusqu’à 150 participants à Sophie Germain, où le blocus a été particulièrement réussi, et avec le vote d’un appel à tous les établissements sur le lycée Montaigne. Cette réémergence de méthodes démocratiques d’organisation de la lutte parmi les lycéens est un élément clé pour la structuration du mouvement, pour lequel le blocage est un moyen d’action souvent indispensable, mais aussi limité s’il n’est pas au service de perspectives supérieures. En attendant la prochaine journée, l’enjeu est désormais de donner une continuité au militantisme qui s’est développé sur des dizaines d’établissements, en mettant en place des comités d’action lycée par lycée, qui auront pour tâche de rédiger les tracts à diffuser à tous les lycéens de l’établissement et pourquoi pas des lycées alentour, de se coordonner entre eux, et de faire vivre la mobilisation par tous les moyens qu’ils pourront imaginer. Afin de déboucher sur des cortèges plus fournis jeudi prochain.

P.-S.

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Mis à jour le dimanche 24 mars 2024