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Ce n’est pas la corruption, c’est tout un système corrompu

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Lancée par un photographe, Vincent Galtier, l’événement Facebook a rapidement pris une ampleur dépassant les espérances de l’organisateur, pour atteindre les 11 000 participants, même si la réalité du rassemblement fut nettement moindre, environ 3 000 personnes à Paris et des centaines dans une trentaine de ville en France.

Sadek Basnacki

C’est en voyant la conférence de presse de Fillon que Vincent Galtier a ressenti le besoin de faire quelque chose. Lui faisant penser à l’affaire Cahuzac, c’était le chèque cadeau en trop. Visiblement, il n’était pas le seul à vouloir exprimer ce ras-le-bol. Des bruits de casserole, « Touche pas au grisbi, Pénélope », « Fillon, en prison ! », des gens assis sur une place… Voilà pour l’ambiance sonore et visuelle. Un ras-le-bol bien compréhensible face à une classe dirigeante qui profite de ses privilèges et du pouvoir qu’ils monopolisent. Fillon, Cahuzac, Le Pen, Macron, Dassault, Sarkozy, Guéant… La liste est longue, très longue. Elle peut l’être beaucoup plus mais la justice fait le tri dans les affaires.

Ces rassemblements sont progressistes dans le sens où ils dénoncent une réalité non dite de la démocratie bourgeoise. Habitués à des pratiques plus que douteuses et parfois légales, les politiciens sont hors de la réalité quotidienne de millions de travailleurs dans le pays. Leurs salaires mirobolants, le fait qu’ils puissent s’augmenter tranquillement pendant qu’ils demandent aux salariés et aux classes populaires de faire toujours plus de sacrifices, sont des sources de dégoût.

Cependant, selon Vincent Galtier, le rassemblement dénonce « ce problème de représentation », qui « fragilise trop la confiance entre les citoyens et la classe politique ». Or, il n’y a rien à attendre des politiques professionnels qui ne servent que leurs propres intérêts et ceux des capitalistes.

Un rassemblement contre la corruption et les privilèges des dirigeants est quelque chose de très fort symboliquement. Nous sommes toujours en état d’urgence, la Ve République est en crise à l’image de ces deux partis socles que sont le PS et LR. Le pouvoir cherche à garder la main mise sur la société par la force, comme on a pu le voir pendant le mouvement contre la loi Travail.

Comble du cynisme, les parlementaires font passer un amendement dans la loi de prescription pénale qui plafonne la prescription pour les infractions dites « occultes » ou « dissimulées », c’est-à-dire les abus de biens sociaux, la corruption, les détournements de fonds publics… Voyant pointer un scandale, leur première réaction a été de dire que cela n’allait pas s’appliquer à Fillon. Mais qu’en est il du reste de ces profiteurs ? Ils font cela pour couvrir leurs arrières, dans une période trouble pour la Ve République où l’ensemble du personnel politique est de près ou de loin impliqué dans des affaires.

Cet amendement peut être mis en relation avec ce qu’il se passe en Roumanie, où le Parti social-démocrate (PSD) voulait faire passer par décret un allègement du code pénal sur les délits liés à la corruption. Un petit arrangement qui aurait permis, entre autres, au principal dirigeant de ce parti, Liviu Dragnea, d’être blanchi. Déjà condamné à deux ans de prison avec sursis pour fraude électorale, il passe en outre depuis le 31 janvier en procès pour une affaire d’emplois fictifs portant sur 180000 lei, un peu moins de 40000 euros et donc bien loin des 900000 euros des Fillon… En réaction, les Roumains sont descendus dans la rue, les plus grosses manifestations depuis la chute de Ceucescu.

Cependant, lors de ces mobilisations contre la corruption, bien que la contestation puisse être légitime, si les travailleurs et les classes populaires n’interviennent pas de façon indépendante, contre toutes les fractions capitalistes, leurs partis politiques et leur État, la contestation peut facilement être canalisée par des institutions comme la justice. C’est en effet l’une des façons pour les capitalistes d’essayer de rélégitimer un régime politique profondément contesté et en crise.

En Roumanie, par exemple, le parti du président Klaus Iohannis, le Parti National Libéral (PNL), essaie de tirer profit de la contestation contre la coalition dirigée par le PSD. Mais c’est surtout le Département national anticorruption, une institution liée à la Justice, aux services secrets et à l’impérialisme, qui en sort renforcé. Il s’agit d’une institution qui apparait comme capable de « nettoyer » le régime et en même temps qui essaiera de renforcer son rôle « d’arbitre » antidémocratique dans le pays.

Au Brésil, avec le coup d’État institutionnel qui a renversé Dilma Rousseff suite aux scandales liés à des malversations de fonds publics, la droite s’est renforcée et a surfé sur cette vague anti-corruption pour lancer sa politique d’austérité contre les travailleurs et les classes populaires. Une fois au pouvoir, l’ancien partenaire du PT, le PMDB du président Michel Temer, a fait adopter par le parlement une série de lois dites « anti-corruption », mais dont la version initiale a été amendée. Ces amendements allaient dans le sens de limiter certaines prérogatives du pouvoir judiciaire concernant notamment les enquêtes anti-corruption. C’est une mesure qui rentre dans le cadre d’une dispute au sein de la classe dominante, où une fraction de celle-ci cherchait à limiter le pouvoir bonapartiste du judiciaire et des agences anticorruption afin de protéger les politiciens des partis dominants qui sont tous, sans exception, embourbés dans des affaires de corruption. C’est sensiblement identique en France, où, du PS au FN, les casseroles trainent.

Il faut avoir en tête ce qu’affirmait Diana Assunção dans Esquerda Diario : « D’une part les politiciens putschistes cherchent de la stabilité pour le gouvernement de Michel Temer sur la base de l’impunité de tous les corrompus. D’autre part, le Tribunal suprême fédéral et les membres de l’opération Lava-Jato [opération anti-corruption du pouvoir judiciaire] veulent protéger leurs super pouvoirs. Cependant, ils sont tous unis pour appliquer le plan d’austérité contre les travailleurs ».

C’est pour cela que pour les travailleurs, la jeunesse et l’ensemble des exploités et opprimés, il s’agit de dénoncer un système qui est corrompu dans son ensemble, dont la corruption est structurelle. C’est en ce sens que, face à des politiciens professionnels qui font de la politique un moyen de s’enrichir, il faut exiger que tous les élus gagnent le même salaire qu’un ouvrier qualifié, et qu’ils soient révocables à tout moment. Toutes les lois permettant l’impunité et l’immunité des élus doivent être abrogées, et les juges doivent être élus et révocables également, afin d’éviter toute collusion d’intérêt avec les politiciens et les grands capitalistes. Ce sont en partie ces mesures qui pourraient contribuer à une lutte réelle contre un système corrompu.

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Mis à jour le dimanche 24 mars 2024