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Vers la crise économique et financière ?

Crédit Photo :
Par The Central Intelligence Agency — Director Petraeus rings opening bell at NY Stock Exchange, Domaine public, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=29195617

La situation actuelle est vraiment particulière : alors que, en général, à la veille d’une crise bourgeoisies et gouvernements relativisent les choses, cette fois-ci, ils n’ont que le mot à la bouche : « Nous ne sommes pas à l’abri d’une récession » déclarait Roux de Bézieux, le patron des patrons, à la veille de l’université d’été du MEDEF.

Simple intox pour annoncer aux travailleurs et retraités qu’il va falloir encore se serrer la ceinture ou bien perspective réelle ? Certains « experts économiques » ont trouvé le responsable : Trump et sa guerre commerciale avec la Chine. En fait, Trump n’est pas un éléphant qui dévasterait un magasin de porcelaine florissant : l’économie mondiale tourne au ralenti et les organismes internationaux revoient de plus en plus leurs prévisions à la baisse. La situation américaine est incertaine mais la zone Euro, et en premier lieu l’Allemagne, est au bord de la récession (c’est-à-dire du passage à une croissance négative) : la production industrielle a baissé de 1,6% en juin 2019 par rapport à juin 2018. En Chine aussi la croissance ralentit malgré les mesures répétées de soutien à l’économie.

Le commerce international connait aussi un net ralentissement. La surproduction est patente dans la sidérurgie et l’automobile. Une baisse de l’ordre de 3% de la production mondiale automobile est attendue pour 2019. La Chine, premier marché au monde, tomberait à moins de 25 millions de véhicules en 2019, soit une baisse de 6 %, depuis son pic de 2017.

Les taux de profit des dernières années ne paraissent pas avoir retrouvé leur niveau de 2007. La hausse du taux d’exploitation est aujourd’hui le principal instrument de lutte du capital pour sauvegarder les profits. Les salaires stagnent (sauf ceux des catégories supérieures et de branches particulières) dans les économies développées (y compris dans celles qui affichent des taux de chômage faibles comme l’Allemagne et les Etats-Unis). Les États jouent également leur rôle de « béquilles » du capital : aux États-Unis (et dans d’autres pays), les baisses des impôts sur les entreprises ont soutenu les profits (après impôts).

Les profits réalisés par les entreprises ont largement servi à des opérations de fusion, des rachats d’actions et des distributions de dividendes ou bien demeurent sur des placements liquides, tandis que l’investissement privé reste limité. L’investissement public est contraint par les politiques d’austérité.

Le capitalisme est plus que jamais financiarisé. Les actifs financiers continuent en effet de croitre une fois passé le choc de 2007-2009. Actuellement les marchés financiers sont ballottés au gré des annonces américaines. Les taux d’intérêt sont aujourd’hui clairement orientés à la baisse, voire négatifs. Aujourd’hui, ces taux manifestent une apparente irrationalité : ils ont plongé et les taux à moyen–long terme ont tendance à être plus élevés que les taux pour les titres à court terme ce qui traduit l’incertitude dans laquelle sont placés les financiers pour le proche avenir : les titres à long terme émis par les grands États fonctionnent comme refuge.

Par ailleurs, l’endettement des Etats et surtout des sociétés non-financières (les entreprises) est reparti à la hausse. En cas de net retournement économique, certaines de ces entreprises pourraient avoir des difficultés à rembourser ce qui mettrait les banques en difficulté. On assiste depuis 2008 à une prolifération des « entreprises zombies » qui ne survivent qu’en s’endettant et en profitant des faibles taux d’intérêt.

Donc, non seulement se profile un fort ralentissement des économies mais existent les éléments d’une crise financière.

Dans l’immédiat, aussi bien la Banque centrale européenne que la Réserve fédérale américaine sont en éveil et ont renoué avec la baisse des taux et les rachats de titres. Quant à la Chine, elle a annoncé plusieurs mesures de soutien de l’économie depuis le début de l’année. Au niveau budgétaire, la donne a changé aux USA avec Trump qui a baissé massivement les impôts des riches et des entreprises et augmenté les dépenses militaires d’où une hausse du déficit désormais acceptée par les républicains.

Mais une autre question se pose : y-a-il encore un pilote dans l’avion mondial pour impulser des actions coordonnées ? « La coopération mondiale se dégrade. La capacité des décideurs politiques à gérer les chocs de l’économie mondiale est moins importante aujourd’hui que par le passé », a déclaré début juillet Benoît Coeuré, l’un des membres les plus influents du directoire de la Banque centrale européenne.

Trump fait flèche de tout bois pour défendre le statut et les intérêts du capitalisme américain, tant économiques que politiques et militaires. Il multiplie les initiatives unilatérales. Parfois, il recule ou temporise, mais le climat d’incertitude est de plus en plus net.

Il est donc douteux que, en cas de nouveaux soubresauts financiers, les USA aient la possibilité et la volonté de rassembler sous leur houlette les autres États capitalistes ; il se pourrait même voire même qu’ils fassent obstacle aux tentatives de coopération pour colmater les brèches… Ce pourrait être un facteur important d’approfondissement de la crise.

Pour résumer la situation : le ralentissement est en cours, la crise financière est probable à un horizon assez bref (mais qu’on ne peut déterminer). Un certain désarroi règne dans les « hautes sphères » toujours déterminées à faire payer la facture par « ceux d’en bas ». Mais, dans le même temps, cette crise constituera un révélateur de la réalité d’un système où ce sont toujours les mêmes qui subissent….

Henri Wilno

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Mis à jour le dimanche 21 avril 2024