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Barbe, prière, ramadan... la chasse aux musulmans est ouverte !

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Après l’appel de Macron à la délation contre « l’hydre islamiste », Castaner a décliné les premières mesures concrètes. « Port de la barbe », « pratique de la prière », un ensemble de mesure qui à vise à stigmatiser ouvertement les musulmans ou assimilés comme tels.
Barbe, prière, ramadan... la chasse aux musulmans est ouverte !

Anasse Kazib
Interrogé lors de la commission parlementaire à propos de l’assassinat de quatre policiers par l’un de leurs collègues à la préfecture de police de Paris, le ministre de l’Intérieur Christophe Castaner s’est livré à la description de ce qu’il considère être des « signes de radicalisation islamiste », créant la colère mais aussi attirant les moqueries sur les réseaux sociaux et le lancement d’un hashtag ironique #SignaleUnMusulman qui est resté en top tendance sur Twitter toute la journée.

Les déclarations de Castaner faisaient écho au discours du président Emmanuel Macron qui avait plaidé pour la « vigilance » face aux signes de « radicalisation ». Autrement dit, le gouvernement est en train de créer un climat de paranoïa et de « chasse aux sorcières permanente » contre l’ensemble des musulmans.

Un saut qualitatif dans la surenchère islamophobe

Depuis plusieurs mois maintenant le gouvernement Macron essaye de conforter de plus en plus sa base sociale de droite, sous la pression électorale du Rassemblement National (RN). Après avoir lancé les premiers débats sur l’immigration, durcissant de plus en plus le ton face à l’accueil ainsi qu’à la solidarité à travers une possible suppression de l’assistance médicale d’Etat, le gouvernement met également les bouchées doubles sur le terrain de la soi-disant lutte contre le « djihadisme » qui se décline de plus en plus dans la construction d’un « ennemi intérieur » : les musulmans.

Pour ne mentionner que quelques exemples, il y a eu la fake news de Jean Michel Blanquer sur les petites filles musulmanes qui n’iraient pas à l’école, démentie par les propres chiffres de son cabinet ; ensuite, quelques jours après, il y a eu la dénonciation de l’affiche du syndicat de parents d’élèves FCPE montrant une mère voilée, en référence aux attaques contre le voile des mères accompagnatrices lors des sorties scolaires.

Aujourd’hui sur fond de récupération politique après la mort de quatre policiers de la préfecture de police, assassinés des mains de Michael Harpon lui même agent des renseignements généraux, le gouvernement a fait un saut dans sa politique réactionnaire reprenant non seulement la rhétorique de l’extrême-droite, mais aussi en déclinant concrètement en visant l’ensemble des musulmans.

Emmanuel Macron a appelé lors du discours durant la cérémonie d’hommage aux victimes, à « une société de vigilance », à « savoir repérer, à l’école, au travail, dans les lieux de culte, près de chez soi, les relâchements, les déviations… ». Seulement quelques jours après le discours islamophobe d’Eric Zemmour lors de la Convention pour la droite, le gouvernement lui emboite le pas, avec la mise en place d’une liste des signes à dénoncer.

Comme toujours après un attentat, mais avec une surenchère dont les conséquences terribles quant à l’encouragement de l’islamophobie ne sont pas encore quantifiables, le gouvernement s’attaque aux musulmans en les stigmatisant et profite de ces lois, comme à l’époque de l’Etat d’urgence, pour renforcer son arsenal répressif bien au-delà des seuls musulmans, afin de mater les mouvements sociaux. Lorsque Macron appelle à faire « bloc » aujourd’hui pour la République face à « l’hydre islamique », le fond de son discours mêle dénonciation de l’islam et des derniers soulèvements contre les institutions de l’Etat à l’image du mouvement des gilets jaunes face auquel Macron n’a pas hésité à utiliser l’arsenal judiciaire antiterroriste.
La barbe, la prière régulière, la « taba’a », le ramadan… Castaner criminalise le fait d’être musulman

Le ministre de l’Intérieur a donc révélé la liste de signes à relever pour anticiper la « radicalisation » : « une pratique rigoriste, particulièrement exacerbée en période de ramadan, c’est un signe (…) d’autant plus évidents qu’ils sont liés à un changement de comportement constaté dans l’entourage ou dans l’individu lui-même, le port de la barbe (…) qu’il fasse la bise ou ne le fasse plus (…) est-ce qu’il a une pratique régulière et ostentatoire de la prière rituelle (…) est-ce qu’on est en présence d’une hyperkératose au milieu du front, c’est la « taba’a » (…) ce sont des indices qui doivent permettre de déclencher une enquête approfondie pour avancer sur ces sujets ».

Cette liste est en réalité le signe d’une stigmatisation sans précédent contre la communauté musulmane. En effet, la liste des « signes à repérer » lancée par le ministre de l’Intérieur correspond aux signes de la pratique religieuse normale de bon nombre de musulman. Pour Christophe Castaner, si vous avez de la barbe, une marque sur le front, que vous pratiquez le ramadan et que vous priez cinq fois par jour, vous êtes la description parfaite de l’individu à signaler pour radicalisme. En somme, si vous êtes un musulman pratiquant vous devez être fiché S.

On peut ainsi s’interroger sur ce que veut dire une « pratique exacerbée de la prière en période de Ramadan » par exemple ? Les musulmans qui sont des millions partout dans le monde à pratiquer la prière de nuit de « Tarawih » durant tout le mois de Ramadan, doivent-ils arrêter pour ne pas être signalés pour radicalisme religieux ?

Cette liste est en réalité une infamie lancée afin de stigmatiser les musulmans dans leur intégralité. Car on se doute que le problème n’est pas la barbe de manière générale, comme le démontre la mode des « hypster » ou encore Christophe Castaner lui-même qui porte la barbe. Mais c’est bien en réalité pour stigmatiser sans les nommer les personnes issues de l’immigration de pays à majorité musulmane, dont beaucoup d’ex-colonies françaises, qui porteront une barbe.

Le ministre de l’Intérieur s’attaque également au fondement même de la pratique religieuse, en mettant dans la case des signes à repérer l’ensemble des musulmans qui prient régulièrement. La lutte contre « l’hydre islamiste » devient ainsi la lutte contre la pratique de l’islam et la stigmatisation de tous les musulmans et même de ceux que l’on soupçonne de l’être.

L’hyperkératose ou « Taba’a » dans les tops recherche du jour sur Google France

Dans cette liste stigmatisante, un nouveau terme, inconnu du grand public, est apparu : « l’hyperkératose » et même sa traduction en arabe à savoir la « taba’a », terme très souvent utilisé par la fachosphère et repris dans la liste de Christophe Castaner.

De nombreux musulmans pratiquants ont une hyperkératose, une maladie dermatologique. Si le ministre de l’Intérieur s’arrête uniquement sur celle visible au front, c’est pour faire croire que cette maladie dermatologique serait le signe d’une pratique trop intense et donc d’une pratique « exacerbée » ou encore une marque physique volontaire que se feraient les personnes « radicalisées ».

Pourtant l’hyperkératose est variable d’un individu à l’autre. Si cela est visible sur le front de certains, bon nombre de musulman pratiquants n’en ont pas, peu importe la régularité de leur pratique. En fonction de la position de prosternation, certains musulmans ont de l’hyperkératose sur le front, les genoux, les mollets ou encore sur le dessus du pied. D’après les dermatologues et les scientifiques, « l’hyperkératose est une altération de la peau et consiste en un épaississement de la couche la plus externe de l’épiderme qui est soumise à une accumulation de cellules épithéliales ou kératinocytes. Les callosités se manifestent avec un épaississement de la peau causée par une friction régulière ».

Si certains sont plus sensibles avec la pause du front au sol, d’autres le sont moins, ou sur d’autres partie du corps. Mais en réalité l’hyperkératose est souvent présente chez beaucoup de personne sans lien avec l’islam, notamment à l’arrière du talon, ou encore chez des personnes comme les ouvriers du bâtiment, les jardiniers ou autres au niveau de la paume des mains ou encore les genoux.

Voila donc la société de « la vigilance » que veut Macron, une société qui se lance dans une chasse aux sorcières ou plutôt une chasse aux musulmans, partout où ils sont. On connait déjà de nombreux patrons, qui surfent sur la vague islamophobe depuis des années pour licencier des salariés musulmans sur des motifs fallacieux, ou encore refuser l’embauche de femmes ou d’hommes selon leur apparence.

Les réseaux sociaux se moquent des annonces de Christophe Castaner !

Après la vidéo devenue virale de Christophe Castaner, les hashtag #SignaleUnMusulman et #BalanceTonMusulman font un carton sur Twitter avec des milliers de tweets dénonçant les propos de Christophe Castaner, tantôt avec ironie, tantôt avec indignation, des milliers de personnes musulmanes ou non, contre-attaquent le tournant islamophobe du gouvernement. On peut lire par exemple « c’est littéralement le feu vert pour ficher tous les musulmans » ; « est-ce que le couscous rentre dans les signes de radicalisation ? » ; « après les lois contre les juifs sous le régime Nazis, voilà que Castaner lance la chasse aux musulmans ».

Le gouvernement voulait sans doute faire passer la pilule sans réactions, il aura en réalité réveillé la solidarité contre la stigmatisation des musulmans voulue par un gouvernement prêt à tout pour attirer les voix et les soutiens des franges les plus réactionnaires de la société.

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Mis à jour le samedi 13 avril 2024