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Pour Géraldine, Aurélia et toutes les autres

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Géraldine, abattue par son ex-compagnon. L’État est complice, mais se défausse

En France, une femme meurt sous les coups de son conjoint ou de son ex-conjoint tous les deux jours. Géraldine est l’une de ses femmes. Était. Le 12 octobre 2012, son ex-conjoint la tue de plusieurs coups de carabine à la sortie de son travail, avant de se donner la mort. Neuf mois plus tôt pourtant, elle avait déposé plainte suite à la menace de mort qu’il lui avait adressée, lorsqu’il avait brandi son arme de service en guise d’avertissement. Mis sur le banc des accusés mercredi 9 septembre par la famille de la victime pour « faute lourde » pour n’avoir donné aucune suite à cette plainte, l’État vient d’être blanchi par la justice.

Sarah Macna

Une pluie d’arguments fallacieux pour couvrir l’État et sa police

Neuf mois avant sa mort, Géraldine, 29 ans, avait eu le courage de porter plainte face à la violence de son conjoint. Une manière parmi d’autres de chercher à mettre un terme à une situation qui, nous pouvons l’imaginer, n’a pas commencé avec cette menace de mort. La police note sa plainte et la consigne bien au chaud dans un dossier qu’elle n’ouvrira plus jamais, « perdue » sans doute parmi les milliers d’autres témoignages de femmes qui subissent chaque jour la violence physique ou psychologique de leur conjoint, de leur mari, de leur ex. L’ex-conjoint de Géraldine étant un agent de la police de l’air et des frontières, la police prend tout de même le temps d’entendre ses « regrets » et de lui retirer son arme pour le punir non pas de s’en être servi pour menacer sa conjointe, mais de l’avoir utilisée en dehors de son service. C’est tout benef’ : cela fait une arme de plus pour pourchasser les migrants à nos frontières dans le cadre de leur service. C’est en partie sur cette « réaction » des policiers que la justice s’appuie désormais pour défausser l’Etat de toute responsabilité. Une réponse « exécutive » où jamais aucun des fonctionnaires de l’Etat n’est venu s’inquiéter du sort de la victime ou lui proposer une quelconque mesure d’éloignement face à son conjoint violent.

Pire encore, l’argumentaire du tribunal correctionnel de Paris s’appuie sur le fait qu’il n’y a pas eu, pendant ces neufs mois, de nouvelles plaintes à l’encontre du conjoint, ce qui « prouverait » que la justice n’a pas commis de négligence. On imagine pourtant aisément que face au manque d’attention reçu de la part des policiers, la jeune femme n’ait pas eu une envie folle de retourner affronter les regards et les questions des agents de police… Cet argument d’une mauvaise foi sans nom revient à nier totalement la situation des victimes de violences conjugales. Selon le dernier rapport de l’Observatoire National de la Délinquance et des Réponses Pénales, 80 % des victimes de ce type de violences n’ont prévenu ni la police, ni les gendarmes, et seule la moitié d’entre celles qui l’ont fait ont porté plainte.

Par ailleurs, la justice préfère apparemment passer sous silence l’un des « mystères » de l’affaire, en ne se préoccupant pas du tout de la manière dont ce dossier aurait « disparu » sur le chemin entre le service de police et le parquet de Lyon. Les soupçons pèsent évidemment sur la police elle-même, qui aurait tout intérêt à couvrir l’un de ses agents et la façon dont il a utilisé son arme. En ne donnant aucun indice là-dessus, la justice et l’Etat donnent raison à ce service de police : entre la parole d’une victime de violences et la raison d’Etat, la justice de notre « belle » République a choisi son camp.

Pour Géraldine, Aurélia, et pour toutes les autres, ni oubli ni pardon

Une précédente affaire, quasiment identique à celle de Géraldine, vient nous rappeler la réalité structurelle des violences faites aux femmes qui demeurent « sans responsables ni coupables ». Aurélia, 32 ans, a été elle aussi tuée par balle par son conjoint avant qu’il ne se donne la mort. Là encore, la police avait été prévenue, cette fois par quatre plaintes successives pour violence, restées sans suite. On imagine, écœurées, ces quatre fois où la victime a dû se déplacer jusqu’au poste de police pour ne recevoir qu’un regard froid et une oreille inattentive face à ses souffrances, sans réponse. Dans ce cas là aussi, la famille de la victime avait voulu porter plainte pour faute lourde contre la négligence des services de l’Etat. Celui-ci, marchand de drames, lui avait alors proposé un deal pour qu’elle abandonne sa plainte en échange de quelques subsides. Si l’acceptation de ce chantage par la famille de la victime est totalement compréhensible et légitime, la proposition de l’Etat, destinée uniquement à se défausser de sa responsabilité, pue la complicité et le mépris.

Dans certaines régions du monde, ce type de crime a un nom : féminicide. Car les exemples de Géraldine et d’Aurélia ne sont pas des faits divers, des cas à part, des exceptions. Il s’agit bien d’un crime de masse, perpétré partout dans le monde à l’encontre des femmes dans cette société patriarcale. L’État est responsable aussi dans ces affaires, en ne mettant pas en place les moyens pour toutes les femmes victimes de violences conjugales pour qu’elles puissent s’en échapper : nous refusons de croire à leurs larmes envers les femmes réfugiées et à leurs grands discours « civilisateurs » et « féministes » chargés de justifier leurs guerres un peu partout sur le globe.

Face aux violences faites aux femmes, à nous de nous organiser.

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Mis à jour le dimanche 24 mars 2024