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Elections en Grèce : les signes du découragement

Au terme d’une campagne électorale assez morne, avec une gauche militante ayant le plus grand mal à convaincre de la possibilité d’une victoire sociale et politique contre les memorandums passés et à venir, les résultats des élections législatives sont assez déprimants.

Certes, la victoire de Syriza est plus large que ce qu’on pouvait penser : la réaction anti-droite et sûrement anti-nazis a été déterminante dans une victoire qui se révèle comme fort large. En effet, avec 99,5% des suffrages dépouillés, Syriza obtient 35,47 % (145 sièges, contre 36,34% et 149 sièges en janvier). Pour comprendre ce score étonnant, il faut rappeler que la haine du bipartisme PASOK /droite même relooké et qui a sévi pendant des décennies, que le soutien même critique de militantes exemplaires comme K. Kouneva, cette syndicaliste vitriolée par des nervis patronaux en raison de sa combativité, ont été déterminants pour le vote de la plus grande partie du ’’peuple de gauche’’ qui a voté hier.

Du coup, la droite, qui espérait en plaçant à sa tête un homme moins impopulaire que l’ancien premier ministre Samaras, se retrouve sans aucun progrès : 28,09 % avec 75 députés (27,8 et 76 en janvier).

A partir de là commencent les résultats accablants, et tout d’abord, le score apparemment en hausse des nazis : Chryssi Avgi serait à presque 7 % , avec 18 députés (6,05% et 17 en janvier). Or, non seulement les chefs de ces assassins sont en attente de procès (mais libérés), mais leur Führer vient de revendiquer , juste avant les élections, la ’’responsabilité politique’’ de l’assassinat du rappeur Fyssa, tué il y a deux ans par un de leurs militants que, grand classique de ces mafieux, le chef présente -en mentant, bien sûr- comme seulement ’’sympathisant’’ des hordes d’horreur. Il est clair que ce résultat implique une action forte, résolue et immédiate contre des tueurs qui ont lors de la campagne agressé des militant-e-s de gauche.

Si le KKE ne profite finalement pas du malaise à gauche (5,55 % et 15 sièges, mêmes chiffres qu’en janvier), les petits partis promemorandum autres que la Nouvelle Démocratie progressent légèrement : le PASOK, laminé en janvier (4,68 et 13 sièges) obtient 17 sièges avec 6,28% ; Potami, haineusement promemorandum, baisse un peu (4,09% et 11 sièges au lieu de 6,05% et 17 sièges), mais c’est pour laisser un peu de place à un parti de même type mais renfermant des fascistes , Enosi ton Kentroon, 3,43 % et 9 sièges. Quant au parti de droite extrême, ANEL , qui cogouvernait avec Syriza, il passe le seuil des 3% nécessaire pour avoir des députés : 3,43% et 9 sièges (4,75% et 13 en janvier)

Quant à Unité Populaire (LAE), le regroupement sorti sur la gauche de Syriza cet été, il obtient 2,86 %. On aurait souhaité qu’il passe les 3%, pour que ce parlement dispose d’une voix de gauche réelle et pas trop sectaire. Mais dans tous les cas, il est clair que ce regroupement a échoué dans sa tentative de se porter comme le ’’successeur naturel’’ du projet de Syriza, et il faudra en tirer les bilans : sorti de Syriza avec 25 députés (3e groupe parlementaire) et crédité de 8 % des voix fin août, il a échoué pour différentes raisons à offrir une alternative de gauche crédible, et justement peut-être parce que manque sur le fond une critique radicale du projet Syriza.

Cette critique, elle est portée depuis longtemps par le regroupement Antarsya, qui a fait le choix de de construire un rassemblement anti-capitaliste indépendant. Amené à présenter des listes autonomes en raison du refus de la direction de UP d’une association électorale UP/Antarsya, Antarsya a mené , en lien avec le groupe EEK, une campagne de terrain battante, ignorée par les medias (le quotidien Efimerida ton Syntakton, journal de référence, a tu ses initiatives pour mieux couvrir celles de Syriza et d’UP). Son résultat (0,85 contre 0,64 en janvier), est loin d’être négligeable pour l’organisation anticapitaliste (à laquelle participe activement OKDE Spartakos, section grecque de la IVe Internationale), et cela la met en situation de proposer à la gauche antimemorandum (dont une partie a voté Syriza) des initiatives pour bloquer les mesures voulues par le ’’quartet’’ : vu les résultats de ce soir, cela relève de l’urgence, et il est vital de savoir proposer dans ce contexte des cadres de front unique ouvrier !

Deux remarques : d’une part, ce sont de 6,41% des électeurs ayant voté pour un parti qui ne se voient pas en cet instant représentés (ainsi : UP, Antarsya …). Et encore plus inquiétant : l’abstention a spectaculairement progressé depuis janvier (43,5 %, contre 36,4%), signe du découragement entraîné par les retournements de Syriza une fois au pouvoir, mais aussi du manque de crédibilité électorale de la gauche antimemorandum, que ce soit le KKE, UP ou Antarsya. Dans un tel contexte, il faudra se rappeler que la moitié des électeurs ne sont pas représentés dans ce parlement, entre abstentionnistes, blancs ou nuls et les 6,41 mentionnés ! Et parmi eux, à l’évidence, de très nombreux jeunes. D’où le constat évident : il est urgent de faire revivre le terrain des luttes : quoi qu’il en soit du futur gouvernement, les choses décisives se passeront encore moins qu’avant au parlement !

Athènes, 21 septembre 2015, 9 heures

A. Sartzekis

P.-S.

Quelques années après « le printemps arabe », la lassitude et la colère monte dans le nord de la Méditerranée, à commencer par la Grèce où un profond désir de rupture se répand contre les formes politiques anciennes…

L’HEURE DES RÉVOLUTIONS APPROCHE AU SUD DE L’EUROPE

Ce dimanche 20 septembre, la mascarade électorale a atteint les sommets de l’indigence, du mensonge et de l’absurdité en Grèce.
Les hommes et femmes les plus intègres et courageux de la vraie gauche grecque ont été chassés comme des malpropres du parlement, au bénéfice des plus lâches et des plus malhonnêtes. Même le Pasok, champion de la corruption, a presque doublé son score, alors qu’il semblait en coma dépassé, tout près de l’euthanasie politique. Les seuls qui avaient montré des actes, au-delà des mots, des actes concrets de résistance au péril de leur vie, contre le nazisme, la dictature des Colonels ou encore la corruption, ont été limogés au bénéfice des pires démagogues qui n’ont jamais rien prouvé sinon leur imposture.
La cause de tout cela n’est pas seulement l’enchainement précipité des événements et le temps insuffisant pour riposter, chacun à sa façon.
La cause principale est plus profonde et elle est double.
D’une part, la misère politique, philosophique et culturelle qui frappe les populations est en train d’atteindre son paroxysme, aidé en cela par des médias de masse plus manipulateurs et abrutissants que jamais.
D’autre part, la lassitude et la colère qui montent partout sont entrées dans le silence et la rupture. Le silence immobile et fécond qui précède le cri et l’action. Le silence ultime avant l’explosion, à l’instar du calme trompeur avant la tempête ou de l’édito du Monde le 15 mars 1968 : « la France s’ennuie ». La rupture à l’égard des formes politiques anciennes qui sont en état de pourrissement avancé.
Une proportion chaque jour plus importante de la population ne supporte plus le manège du pouvoir et la valse des valets interchangeables, la fabrique de l’opinion au marteau-piqueur et le vide sidéral des divertissements consacrés à la diversion, la surveillance devenue digne des pires régimes autoritaires et la répression calculée qui cherche violemment à intimider, les inégalités qui se creusent et la liberté bradée contre une sécurité illusoire qui n’est pas la nôtre, bien sûr, mais celle du pouvoir lui-même.
Chaque année, chaque jour, chaque heure qui passe voit nos chaînes se serrer plus encore.
Chaque année, chaque jour, chaque heure qui passe voit notre capacité à résister amoindrie.
Mais, aussi affaiblie soit-elle, cette capacité reste bien présente et palpable, forte de sa légitimité face à l’humiliation politique, à la souffrance sociale, à la destruction du bien commun et à la négation de la vie.
Le silence devient assourdissant et le calme frénétique, en Grèce comme ailleurs.
N’écoutez pas ceux qui vous disent que nous sommes fatigués ou résignés. Nous ne sommes fatigués que de les entendre. Quant à la résignation, nous en reparlerons durant l’automne. Vous verrez, entendrez, vibrerez.
Écoutez, dans le silence, les dernières gouttes de sang, de sueur et de larmes remplir le vase qui déborde.
L’heure des révolutions approche au sud de l’Europe, quelle que soit la forme, dans le crépuscule des idoles et la nuit du sens, dans la diversité de ce que nous sommes et le dénominateur commun de ce que nous désirons : sauver la vie et lui redonner toute sa valeur aux antipodes des valeurs mortifères d’un vieux monde en ruine qui n’en finit plus de mourir.
L’heure viendra où nous briserons les murs du silence et les chaînes du spectacle.
L’heure viendra où nous déchirerons les chaînes de papier, annulerons les dettes et reprendrons le bien commun à ceux qui ont voulu se l’approprier.
L’heure viendra où nous vivrons ensemble autrement, dans la coexistence de formes multiples, joyeuses et fertiles.
Courage à celles et ceux qui sont tristes.
Tenez bon. La coupe est pleine, la vie va déborder et reprendre ses droits.
Yannis Youlountas
(texte comme toujours libre d’usage)

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Mis à jour le dimanche 24 mars 2024