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Nouveau Code du travail. PS et MEDEF veulent notre peau

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« C’est une véritable révolution ». C’est par ces mots que Manuel Valls a annoncé, ce mercredi, la « refonte » du droit du travail qui devrait se terminer en 2018. Plus qu’une refonte, il s’agit même de le réécrire dans son intégralité autour de trois axes : « simplifier, négocier, sécuriser ». Derrière ces effets d’annonce, quid de leur « révolution » ?

Damien Bernard

Les élections présidentielles approchent, le MEDEF s’impatiente. Les quatre années d’attaques socialistes marquées du sceau du « dialogue social » et du pacte de responsabilité ont permis jusqu’ici de faire patienter un patronat resté sur sa faim sous l’hyper-présidence Sarkozy. Mais ces avancées restent partielles pour Gattaz qui ne rêve que d’une chose : la fin du « CDI » tel qu’il existe actuellement. Avec une nouvelle « architecture » du code du travail pour 2018, le gouvernement tente son va-tout pour séduire le patronat.

Sécuriser un « socle de fondamentaux »…

Le code du travail sera reconstruit en trois parties : un premier niveau constitué des « droits fondamentauxintangibles », un deuxième relatif aux sujets relevant des « accords de branche ou d’entreprise », enfin un troisième comprenant les règles « supplétives » s’appliquant en cas d’absence d’accord collectif.

Pour définir le socle de « droits fondamentaux », le gouvernement table sur un délai qu’il estime « record ». Pour cela, il a mis sur pied une mission de Sages, présidée par Robert Badinter, qui s’était illustré avec son ouvrage Le travail et la loi. Ce socle « gravé » dans la loi serait garant de « l’ordre public social » maintenant ainsi formellement le salaire minimum, le CDI, la durée légale des 35 heures et le paiement en heures supplémentaires au-delà.

Cependant, cette nouvelle « redistribution » des droits des salariés, acquis sous la pression des luttes du mouvement ouvrier, ne se fera pas « à droits constants », concède Manuel Valls. Mais elle ne remettra pas en cause « la hiérarchie des normes », à laquelle François Hollande serait « très attaché ». Des formules alambiquées qui cachent une toute autre réalité.

…pour mieux y déroger ensuite ?

Une fois le socle gravé dans la loi, qu’en sera-t-il de son application concrète ? « Quel mode d’organisation, quelle modulation sur l’année, quelle compensation ? Il reviendra aux acteurs de terrain d’en décider », a déclaré Manuel Valls. Ainsi le second niveau de la nouvelle architecture définira ce qui pourra être traité par accord collectif de branches ou d’entreprise. Les branches seront au passage « réformées », et passeront de 700 aujourd’hui à 200 d’ici à trois ans, et 100 à terme.

Manuel Valls illustre ainsi très concrètement une application de ce second niveau : « Imaginez une entreprise souhaitant lancer un nouveau produit nécessitant de faire travailler ses équipes 48h par semaine pendant douze semaines. Aujourd’hui, c’est impossible, sauf à être dans un secteur très spécifique et avec l’autorisation de l’administration. Demain, si un accord d’entreprise le prévoyait, cela serait possible. »

Matignon ajoute qu’un employeur pourra fixer par accord majoritaire d’entreprise le taux de rémunération des heures supplémentaires à un niveau inférieur à celui de l’accord de branche. Un autre employeur pourra, de manière exceptionnelle, faire travailler ses salariés 60 heures par semaine pendant 3 semaines sans demander l’autorisation de l’inspection du travail s’il a négocié un accord majoritaire. Une réalité qui semble pourtant bien loin des 35 heures figés dans le granit de la loi.

Les dérogations aux 35 heures, les baisses de salaire, la flexibilité et l’annualisation du temps de travail existent déjà, imposées par Gattaz et le patronat le couteau sous la gorge aux salariés. Les accords d’entreprise et de branches, votés depuis la loi du 20 août 2008 sous Sarkozy, permettant de nombreux cas de dérogations, lui sont déjà bien utiles pour cela. Mais on l’aura compris : il s’agit désormais pour le gouvernement d’encourager le patronat à généraliser ces accords afin de les rendre quasi systématiques. Et pour cela, aucun moyen n’est exclu, à commencer par les référendums, comme l’a démontré l’exemple de SMART. L’exception et la dérogation deviendront la règle.

Apparaître comme le meilleur complice du patronat pour 2017 ?

Engouffré dans une spirale de discrédit, le PS se trouve en très grande difficulté face aux prochaines élections régionales, et ce malgré le lancement de l’opération de reconquête de l’électorat populaire. Il faut pourtant, pour Hollande, donner des gages au patronat français, pressé par la crise et la concurrence exacerbée.

Il s’agit cependant d’un subtil équilibre. Pour l’Elysée, il faut répondre au mieux aux exigences du MEDEF et garder l’assentiment d’une fraction suffisamment représentative du patronat, sans se décrédibiliser pas ultérieurement auprès de la base électorale socialiste. Plus récemment, une démonstration qu’il a plutôt réussie avec brio avec le recul de l’âge de la retraites à 63 ans signé avec la complicité de la CFDT.

En s’attaquant en premier lieu, et dès l’année prochaine, au volet hautement épineux : la durée du travail, le gouvernement donne un gage important au patronat : la remise en cause des 35 heures, et cela concrètement, par le « dialogue social » et les « accords » d’entreprise ou de branche. Une façon pour le patronat de « rétablir » ou d’augmenter directement ses profits. Un conseiller ministériel reconnaît : « Il nous a fallu naviguer entre l’impossibilité de toucher aux 35 heures, qui reste un totem pour notre électorat et les syndicats, et la nécessité d’assouplir la façon dont le temps de travail est articulée dans notre pays, car c’est une un vrai levier de compétitivité. »

Dans ce contexte, il faut sécuriser le « terrain social » au plus vite, en gravant dans le marbre de la loi le CDI et les 35 heures. Pour l’Elysée, tout embryon de mobilisation autour du Contrat à Durée Indéterminée ou de la durée « légale » du travail est à proscrire, hanté qu’il est par le spectre des mobilisations contre le CPE de Villepin en 2006.

Pour le président, l’équation en vue des élections de 2017 est complexe. Un conseiller ministériel reconnaît : « Il nous a fallu naviguer entre l’impossibilité de toucher aux 35 heures, qui reste un totem pour notre électorat et les syndicats, et la nécessité d’assouplir la façon dont le temps de travail est articulée dans notre pays, car c’est une un vrai levier de compétitivité. » Ainsi pour l’Elysée, il faut éviter tout remous sur le terrain de la contestation sociale, tout en démontrant au patronat qu’il sera toujours le meilleur pourfendeur des acquis du mouvement ouvrier, contre la droite et l’extrême droite, et ce sur la base d’une impopularité record. Une équation impossible pour François Hollande ?

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Mis à jour le samedi 13 avril 2024